Les Hauts-de-France abritent près de 800 000 habitations énergivores, héritages du passé industriel de la région. Que ce soient dans les corons, dans le bassin minier, ou les courées, à Lille et Roubaix (Nord), ces petites maisons en briques sont de véritables passoires.
"Depuis quatre ans, les collectivités et les particuliers s’adressent davantage à nous", explique Frédéric Laroche, le responsable du pôle bâtiment durable du Centre de développement des éco-entreprises (CD2E), implanté à Loos-en-Gohelle (Nord). Des aides des collectivités et de l’État encouragent la rénovation des maisons du Nord et leur préservation. Avec un mot d’ordre, réduire la fracture énergétique, et un objectif, réaliser rénover 23 000 logements d’ici à 2027.
Plusieurs acteurs locaux sont positionnés sur le marché des matériaux biosourcés, à l’instar de Cogebloc, installé depuis 2002 à Dunkerque (Nord), qui fabrique des isolants à base de pierre ponce. "Nous avons développé un process spécifique, précise Éric Agostini, le dirigeant. À partir de pierre ponce extraite en Grèce et acheminée par voie maritime, nous fabriquons des blocs isolants, malaxés avec du ciment et de l’eau. Le tout est placé dans des moules, vibré puis pressé à froid avant d’être entreposé dans des racks de stockage. Nous consommons sept fois moins d’énergie que les industriels avec d’autres types d’isolants et nous utilisons 60 litres d’eau pour 1 mètre cube de pierre ponce." Quelque 20 000 à 40 000 blocs sont produits par jour, soit 25 000 tonnes par an. Les propriétés de la pierre ponce confèrent à ces blocs épais de 20 à 45 centimètres une isolation durable.
Recherchée pour ses propriétés isolantes, thermiques et phoniques, avec 836 000 tonnes mobilisables, la paille pourrait également se révéler un matériau biosourcé intéressant pour le bâtiment. Son marché reste marginal, mais les expériences se multiplient. À Aulnoy-lez-Valenciennes (Nord), les bâtiments du complexe scolaire Jules-Ferry ont été réhabilités avec 11 500 ballots de paille, mais aussi avec du lin, du chanvre, du bois, de la terre crue et de l’argile. Le siège du CD2E, à Loos-en-Gohelle, est lui aussi brandi comme un exemple de réhabilitation réussie. Tous les ans, un millier de professionnels, de cadres d’entreprises et d’acteurs économiques et politiques, se déplace de toute la France pour apprécier les performances réalisées par Réhafutur, nom du bâtiment. La rénovation de ces 300 mètres carrés en a fait un bâtiment passif grâce à une isolation assurée par une quinzaine de matériaux différents (béton de chanvre, laine de lin, matériaux recyclés, comme du Métisse). Le sol est recouvert de liège et de ouate de cellulose et l’étanchéité à l’air est assurée par une membrane et la pose d’un enduit. Parmi ses performances affichées, une consommation d’énergie divisée par vingt.
Tous métiers confondus (fournisseurs de paille, bureaux d’études et architectes, entreprises de construction), les Hauts-de-France comptent une cinquantaine d’acteurs recensés en vue de la création d’une filière paille, dont une dizaine d’agriculteurs. Dans le cadre du Fonds régional d’amplification de la troisième révolution industrielle (Fratri), la Région soutient notamment des études visant à trouver les meilleures solutions techniques. Les presses actuelles produisent pour la plupart des balles de paille cylindriques, inutilisables en vue de la construction, ou parallélépipédiques, mais qui ne sont pas au bon format.
Le Codem, centre d’innovation en éco-matériaux
Pour expérimenter et tester différents formats et produits, le Centre de transfert de technologie spécialisé dans la construction durable et les éco-matériaux (Codem), situé à Amiens (Somme), met à disposition des promoteurs immobiliers, aménageurs, lotisseurs, bailleurs sociaux, maîtres d’ouvrage et autres entreprises de construction un véritable laboratoire. Il dispose, dans sa halle de 1 600 mètres carrés, de deux lignes pilotes pour concevoir et fabriquer des matériaux innovants (bétons biosourcés ou recyclés, panneaux d’agencement à faible impact environnemental et sanitaire, mousse isolante biosourcée…). À l’instar de ce qui se fait avec du chanvre, le Codem aide les artisans et les PME du bâtiment à formuler leurs mélanges de bétons isolants, quelle que soit la nature des granulats biosourcés qu’ils souhaitent utiliser : lin, colza, sorgho, miscanthus, bois… "Nous développons des formulations spécifiques pour la fabrication de blocs ou d’éléments préfabriqués en bétons biosourcés ayant des caractéristiques intéressantes", explique Boubker Laidoudi, le responsable R & D du centre. Une fois les formulations mises au point, elles sont développées à l’échelle industrielle, ce qui permet de produire des premières séries de blocs et de les mettre en œuvre dans des chantiers pilotes.
Le développement d’une filière paille régionale laisse entrevoir des créations d’emplois et des montées en compétences, tant du côté du monde agricole que des entreprises de construction. En 2016, environ 720 millions d’euros de travaux ont été réalisés pour rénover environ 25 000 logements privés et 8 600 logements sociaux. L’ambition affichée porte dorénavant sur 63 000 logements par an réhabilités. Le nombre d’emplois dans le secteur de la rénovation est estimé à 16 000 et devrait atteindre 28 000 d’ici à 2050 dans les Hauts-de-France.
Métisse - Du jean dans les murs
Développé depuis 2012 par la société coopérative du Relais à partir de coton recyclé (essentiellement des jeans et des velours de seconde main), Métisse est un isolant thermique et acoustique. L’usine, à Billy-Berclau (Pas-de-Calais), se compose d’une ligne dédiée à la conception de laine d’isolation et équipée des dernières technologies (rayons X pour calibrer la densité de l’isolant lors du nappage, par exemple). Le processus de fabrication est très peu énergivore. Le Relais utilise un four à basse température pour fabriquer la nappe d’isolant. Solution de recyclage de textiles non réutilisables en l’état et voués à l’incinération, Métisse est disponible en panneaux, en rouleaux et en flocons. Il présente l’avantage de pouvoir être recyclé à nouveau. Devenue en quelques années le leader européen de l’isolation en coton recyclé, cette activité du Relais emploie une trentaine de personnes et produit environ 1 million de mètres carrés d’isolant par an.
G-Lyte - La vie en couleurs
G-Lyte développe à Amiens (Somme) une nouvelle génération d’électrolytes ultra-stables à haut rendement. Fondés sur la technologie des cellules à colorant, ils permettent d’augmenter la durée de vie des modules photovoltaïques jusqu’à vingt ans (contre cinq à sept ans actuellement). Les principales applications se situent dans le bâtiment et visent en premier lieu le marché du photovoltaïque intégré aux façades ainsi que le mobilier urbain. Accueilli au sein du Hub de l’énergie, animé par le Laboratoire de réactivité et chimie des solides, à Amiens, G-Lyte bénéficie du savoir-faire et des équipements d’un pionnier européen en R & D dans le domaine de la production et du stockage de l’énergie. Avec cette technologie brevetée, l’entreprise prévoit de réaliser un chiffre d’affaires de plus de 2 millions d’euros d’ici à 2021 et de créer dix emplois au cours des deux prochaines années. Lauréat du concours iLab 2019 organisé par Bpifrance, G-Lyte vient de réaliser un premier tour de financement d’un montant de 460 000 euros auprès de Finovam Gestion et CNRS Innovation.
July 30, 2020 at 02:49PM
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[Rénovation énergétique] Paille, chanvre, pierre ponce dans le Nord - BTP - Construction - L'Usine Nouvelle
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